La voisine de Saigon

23 Oct

Dès l’aube, de l’autre côté de la rue, la voisine replie la porte de sa maison et tire sur le bitume de petites chaises en plastique et leurs tables courtes sur patte.

D’où je me trouve, elle est un peu cachée par la tombe de l’ancien propriétaire des terrains sur lesquels le quartier a poussé. D’abord doucement, le temps de percer la terre, puis à coup d’extensions, il a recouvert le moindre interstice.

Le vieil homme repose là, sous cet édifice que les enfants s’amusent à escalader et sur lequel les adolescents posent longuement leurs conversations. Il ne s’en émeut pas et accueille sur sa pierre grise la jeunesse de Saigon.

Derrière, la femme a installé une cuisinière faite d’un bidon métallique coupé en deux et rempli de charbon. Sur la grille des morceaux de porc crépitent. Dans les assiettes, elle dépose un riz parfumé, une omelette bien cuite et la viande encore brûlante.

Il n’en coûte même pas 50 centimes d’euros.Un prix qui créé généralement un sentiment euphorique chez les voyageurs. Ils le martèlent à leur retour en détachant bien toutes les syllabes. Impression furtive de pouvoir dévorer le monde.

Des enfants en uniforme, en route pour l’école, s’arrêtent pour prendre leur petit déjeuner puis s’éparpillent.
Déjà, la voisine a empilé ses chaises et refermé son pot de nuoc mam.
Il est 7 heures, la journée a ouvert un oeil, puis les deux et vagabonde dans les rues brûlantes d’humidité.

2 Réponses to “La voisine de Saigon”

  1. mpeyroux mars 12, 2013 à 6:06 #

    Blog original, textes intéressants.

    • Marion mars 12, 2013 à 7:48 #

      Merci beaucoup pour ce commentaire.

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